vendredi 31 janvier 2014

Publiés en 2013 (3): La Cuisinière d'Himmler - Franz-Olivier Giesbert


Franz-Olivier Giesbert, né le 18 janvier 1949, s'est d'abord fait connaître en tant que journaliste: ayant débuté au service politique du Nouvel observateur, il a notamment été par la suite directeur du Point, poste qu'il vient de quitter. Mais il est aussi l'auteur de près d'une trentaine de livres. La Cuisinière d'Himmler, publié au printemps 2013, est son treizième roman, et le premier que je lis.

Il s'agit des mémoires imaginaires de Rose, qui  à 105 ans est toujours cuisinière et propriétaire du restaurant "La Petite Provence" à Marseille. Après avoir reçu une lettre qui fait remonter ses souvenirs à la surface, elle prend la plume pour retracer sa vie tumultueuse.

C'est son personnage principal qui m'a donné envie de lire ce roman. La quatrième de couverture présente l'héroïne et narratrice comme une femme qui ne se laisse pas abattre et rebondit toujours après avoir touché le fond. C'est vrai. Mais le résumé oublie de préciser que pour elle, la fin justifie les moyens. Elle prône donc la vengeance, se fait justice elle-même... et s'avère au final pas franchement aimable.

De plus, Franz-Olivier Giesbert a voulu aborder trop de sujets : Rose fait le tour de la planète, vit le génocide arménien, côtoie les figures du Paris de l'entre-deux-guerres, devient la cuisinière d'Himmler en plein cœur de la Seconde guerre mondiale,... au point de devenir une vraie caricature. A l'image d'ailleurs des autres personnages, réduits à des silhouettes qui ne font que traverser la vie de l'héroïne. Et à force de vouloir faire de celle-ci un condensé du XXe siècle, en accumulant au passage les clichés, l'auteur finit par ôter toute crédibilité au roman. 

Or l'histoire reste le principal intérêt d'un livre au style très plat. Même si quelques passages sont plus réussis, Franz-Olivier Giesbert a en effet souvent tendance à réduire le discours de Rose à un chapelet de platitudes et de jugements à l'emporte-pièce qui s'amoncellent.

Au final, ne reste donc de La Cuisinière d'Himmler que le souvenir d'une histoire mal écrite qui prône des valeurs douteuses. Une déception qui ne m'a pas vraiment fait rire et m'a ôté toute éventuelle envie de lire un autre roman de l'auteur. Mais c'est un roman qui divise, si l'on en croit les critiques très contrastées publiées sur Babelio.

Le début du prologue, pour vous donner une idée du ton du livre :

"Je ne supporte pas les gens qui se plaignent. Or, il n’y a que ça, sur cette terre. C’est pourquoi j’ai un problème avec les gens.
Dans le passé, j’aurais eu maintes occasions de me lamenter sur mon sort mais j’ai toujours résisté à ce qui a transformé le monde en grand pleurnichoir.
La seule chose qui nous sépare des animaux, finalement, ce n’est pas la conscience qu’on leur refuse bêtement, mais cette tendance à l’auto-apitoiement qui tire l’humanité vers le bas. Comment peut-on y laisser libre cours alors que, dehors, nous appellent la nature et le soleil et la terre ?
Jusqu’à mon dernier souffle et même encore après, je ne croirai qu’aux forces de l’amour, du rire et de la vengeance. Ce sont elles qui ont mené mes pas pendant plus d’un siècle, au milieu des malheurs, et franchement je n’ai jamais eu à le regretter, même encore aujourd’hui, alors que ma vieille carcasse est en train de me lâcher et que je m’apprête à entrer dans ma tombe.
Autant vous dire tout de suite que je n’ai rien d’une victime. Bien sûr, je suis, comme tout le monde, contre la peine de mort. Sauf si c’est moi qui l’applique. Je l’ai appliquée de temps en temps, dans le passé, aussi bien pour rendre la justice que pour me faire du bien. Je ne l’ai jamais regretté." (p. 13-14)

Et l'un des rares passages qui m'a fait sourire: 
« Un jour, après que Jacky m'eut dit qu'il avait le sentiment d'avoir raté sa vie, je lui demandai quel genre d'homme il aurait aimé être. Il m'a répondu sans hésiter:
"Une femme." » (p. 96)

Franz-Olivier Giesbert, La Cuisinière d'Himmler, Gallimard, 2013, 369 p.
  

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